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Here's the original version of last part of Élisabeth's memoirs and some miscellaneous notes.

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Catastrophe du 9 thermidor.

 

                Au jardin Marbeuf, peut-être quatre ou cinq jours avant le 9 thermidor, Philippe me dit : « Si ce n’était pas un crime, je te brûlerais la cervelle et me tuerais ; au moins nous mourrions ensemble… Mais non ! il y a ce pauvre enfant ! »

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                Au Champ-de-Mars, lorsque Babeuf, Bourdon et d’autres dirent que Robespierre périrait de leurs mains, mon mari me dit : « La patrie est perdue ! »

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                Lorsqu’ils sont venus mettre les scellés chez nous, ils nous prirent toute notre correspondance intime, nos papiers de famille, et on ne nous a jamais rien rendu. Ils n’ont jamais parlé, dans le rapport de cet infâme Courtois, d’une correspondance qu’ils ont trouvée dans les papiers de mon pauvre mari concernant les vols et les rapines faits en Belgique par ces misérables Danton, Bourdon de l’Oise et Léonard Bourbon [Bourdon] et d’autres. Jamais on n’en a parlé ; ils ont tout fait disparaître de ce qui pouvait démontrer leur crime.

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                Aussitôt après l’arrestation de mon mari, on vint mettre les scellés chez nous. Le gardien nous coûta cinq francs par jour. Le Bas y fut amené par des agents du comité de sûreté générale pour assister à cette opération, et fut ensuite conduit à la Force.

                Quelques heures plus tard mon mari me fit dire par un dire par un commissionnaire de lui envoyer un lit de sangles, un matelas et une couverture. Je me rendis à la Force, accompagnée de ma belle-sœur Henriette, avec ces objets dans un fiacre. En y arrivant je vis à la porte de la prison une grande foule de gens exaspérés. J’appris alors que le peuple venait pour délivrer les prisonniers.

                J’abandonne aussitôt la voiture pour courir vers mon mari ; nous marchons tous trois dans la direction de l’Hôtel de Ville ; chemin faisant, il m’exhorte à retourner chez moi, me fait mille recommandations au sujet de notre fils, me prie de ne point lui faire haïr les assassins de son père : « Nourris-le de ton lait, me dit-il ; inspire-lui l’amour de sa patrie ; dis-lui bien que son père est mort pour elle ; adieu mon Élisabeth, adieu ! » Là il fallut me séparer de lui. Ses derniers mots furent : « Vis pour notre cher fils ; inspire-lui de nobles sentiments, tu en es digne. Adieu, adieu ! » Et je ne le revis plus…[1].

                Je revins chez moi avec sa sœur bien-aimée. Jugez de ma douleur cruelle, de mon désespoir ! Nous rencontrâmes en revenant sur le quai trois députés à cheval, qui paraissaient être dans un état d’exaspération horrible : c’était Barrère [sic], Bourdon ; je ne reconnus pas le troisième ; ils proclamaient la mise hors la loi de mon malheureux mari et celle de ses infortunés amis. Je ne savais pas ce que c’était que la mise hors la loi ; mais les figures atroces de ces trois hommes me firent horreur et je vis bien que mon mari et ses amis étaient perdus.

                Je rentrai chez nous éperdue, presque folle. Jugez de ce que j’éprouvai lorsque notre cher enfant me tendit ses petits bras ; il y avait cinq semaines seulement que j’étais accouchée ; la force et la raison m’abandonnaient ; je ne pouvais me soutenir ; du 9 au 11 je restai sur le parquet ; je n’avais plus de force ni de connaissance ; je ne me couchai pas. Grand Dieu ! et l’on ne meurt pas de douleur.

                Je fus tirée de mon anéantissement par l’arrivée d’agents de police ou d’agents du Comité de sûreté générale. On me mena à la prison de Talarue, où je fus bien mal, sans air, sans une croisée, avec mon fils et ma sœur ; il y pouvait à peine tenir deux lits de sangle, deux chaises et une toute petite table. Jugez de mon affreuse position ! Je n’avais de jour que par une tabatière, et bien petite ; à peine si nous pouvions respirer. J’étais mère de cinq semaines ; j’allaitais mon fils ; j’avais moins de vingt et un ans ; j’étais privée de presque tout ; après la mort de mon malheureux mari j’avais à ma charge ma sœur, qui ne pouvait rien me procurer, puisqu’elle-même manquait de tout. Notre position était tellement affreuse que ma belle-sœur dut retourner dans sa famille. Il suffisait que, jeune et jolie, elle n’eût plus son mentor, pour qu’elle ne pût solliciter ma liberté ; ces misérables, tels qu’un Ricord et autres, la poursuivaient, cherchant tous les moyens de la séduire, lui promettant même ma liberté. Quoiqu’elle fût jeune, elle vit bien que ces monstres cherchaient toutes manières de la corrompre et de déshonorer la famille. Elle préféra partir, devinant bien qu’ils ne feraient rien pour moi ni pour mon beau-frère François Le Bas, adjutant-major (les deux familles avaient été arrêtées).

                Dans la matinée du 10, une femme vêtue de noir et couverte d’un grand voile, demanda à me parler ; elle ne voulait ne parler qu’à moi seule, disait-elle, de la part de mon mari qui l’avait chargée de venir me voir ; elle insista vivement ; mais ma belle-sœur et quelques personnes qui étaient près de moi ne voulaient pas que cette femme me vit seule. Ces pauvres amis crurent voir en elle une envoyée des ennemis de mon mari, qui venait pour m’assassiner ainsi que mon fils, afin de se débarrasser d’une femme qui adorait son mari et d’un fils auquel sa mère n’inspirerait sans doute un jour le devoir sacré de défendre la mémoire de son malheureux père.

                Des amis firent tout ce qu’ils purent pour obtenir ma liberté ; ils ne purent rien. J’étais malade ; je fis la demande que l’on me mit dans une chambre plus saine et plus aérée ; on me la refusa.

                Jugez de ce que je devais souffrir ! Obligée de laver le linge de mon fils, je descendais sur les dix heures avec une petite lanterne. Il y avait dans la cour un abreuvoir ; je descendais lorsque tous les prisonniers étaient retirés. J’avais dû obtenir du geôlier la permission de laver les couches de mon enfant ; ensuite je remontais dans mon grenier (car j’étais au-dessus des écuries ; il y avait des odeurs infectes). Comme il faillait les faire sécher, je les mettais entre mes matelas et ceux de ma bonne sœur, qui s’était sacrifiée pour venir partager mes fatigues et mes peines… oh ! je ne t’oublierai pas de ma vie ! car sans toi j’aurais succombé ; mais, par ton courage, tu as ranimé mes forces et tu m’as appris que j’avais une grande tâche à remplir, que j’avais un fils, qu’il fallait vivre pour lui.

                Une nuit, le geôlier vint me réveiller me dire de descendre, qu’il y avait deux citoyens qui désiraient me parler. Jugez de ma joie ! Je crus qu’on venait m’apporter ma liberté. Hélas ! ce n’était pas cela ! Ces misérables envoyaient des agents pour me faire des propositions : ils me dirent que, si je voulais quitter le nom infâme de mon mari, il y avait un député qui m’épouserait, que l’on reconnaîtrait mon fils pour enfant de la Patrie, qu’on lui ferait un sort heureux, et que je serais mise en liberté tout de suite. Quel réveil pour moi ! Pensez ce que je pus dire à ces misérables ! « Allez dire à ces monstres que la veuve Le Bas ne quittera ce nom sacré que sur l’échafaud. » Ils me répondirent que j’avais tort et que je resterais longtemps en prison : « Allez ! vos menaces ne me font pas peur ; je ne crains plus la mort. »

                Croyez-vous qu’ils revinrent à la charge, dès le surlendemain, me tourmenter et me montrer ma liberté signée ; ils me dirent que si je consentais, mes peines finiraient, et que si je persistais, je verrais ce que c’est que de résister. J’étais si jeune ! ils crurent avoir raison de moi. Mais ils virent le contraire, ils virent que j’avais du courage. Dieu ne m’abandonna pas ; je leur ai bien fait voir combien la vertu a de force.

                Ils s’aperçurent qu’ils ne réussiraient pas ; aussi, quelques jours après leur visite, on vint m’avertir qu’on allait me changer de prison. Nous étions six, ma sœur, moi et quatre autres ; on nous fit monter dans une charrette découverte. (Non, bonne chère sœur Éléonore, je n’oublierai de ma vie tout ton dévouement pour moi et pour ton pauvre petit neveu ; ma reconnaissance sera éternelle !)

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                Au sortir de la prison, je me trouvai toujours sans ressources. Un ami de mon pauvre Philippe vint me voir et me dit qu’il fallait réclamer ce qui était dû à mon mari.

                Bien que dénuée de tout, très voisine de la misère, je ne voulais rien leur réclamer à ces misérables. Je ne voulais faire aucune demande. Mais ce bon ami, voyant qu’il ne pouvait rien obtenir de moi, la fit à ma place, quelques jours après et sans me le dire ; je fus fort surprise de voir arriver une lettre à mon adresse, timbrée du Comité des inspecteurs (?) : on me disait de me rendre tel jour au Comité des secours pour affaire qui me concernait. Jugez de mon désespoir ! Moi qui n’avais rien demandé ! je fus la rage dans le cœur au Comité des inspecteurs ; là je trouvai l’ancien garçon de bureau de mon mari ; il me reconnut bien : il venait souvent chez nous porter des papiers à mon Philippe. Je lui demandai du papier et de l’encre ; il me le refusa ; il vit bien que je voulais faire quelque chose d’imprudent. Il me pria de ne pas écrire ; ces méchants, disait-il, me feraient remettre en prison ; il me suppliait de ne rien faire.

                Voyant qu’il ne voulait pas me donner ce que je lui demandais, je pris une plume et un morceau de papier que je trouvai sur le bureau. Là, avec une épingle et la plume, je me fis une large piqûre et j’écrivais avec mon sang au président Rovert que si l’on avait réclamé ce qui était dû à mon mari, je ne demandais pas des secours de ses assassins ; je signai : « Veuve Le Bas ».

                A peine avais-je fait remettre ce billet que je vis ce misérable Rovert sortir de l’ombre et crier : « J’ordonne d’arrêter cette femme. »

                —Eh bien ! je me moque de vous !

                —Qu’on la mène en prison.

                Ces pauvres gens, voyant une veuve avec un jeune enfant de dix mois à peine, ne savaient que faire. Au moment où ils se décidaient à m’arrêter, l’ami de mon mari, dont j’ai parlé plus haut, entra et me reconnut.

                —Quoi ! c’est vous ! me dit-il.

                Il entra au Comité et expliqua mon billet. Mon défenseur lui dit : « C’est moi qui suis cause de cela ; la veuve Le Bas ne voulait rien demander ; j’ai adressé cette requête à son insu. » L’autre était furieux et ne voulait rien entendre. Mon ami me dit de me retirer ; il allait tout arranger, ajoutait-il, et il irait me voir.

                Je me retirai enfin, mais la mort dans l’âme, et je n’entendis plus parler de rien, ni de ce qui était dû à mon mari, ni des secours que ces monstres auraient voulu me faire accepter pour me déshonorer. Mais, si j’étais jeune, je savais être fière du nom que je portais.

                Le même ami vint me voir et m’exprimer tous ses regrets de ce qu’il avait fait, disant qu’il l’avait fait pour le bien, ne pensant pas qu’on m’offrirait un secours, mais seulement ce qui m’était dû : « Si vous voulez me prouver, me dit-il, que vous ne m’en voulez plus, veuillez accepter ma bourse. » Je remerciai beaucoup et je lui répondis que, si j’avais besoin, je ne m’adresserais à un autre qu’à lui. Il parut heureux de cette réponse et s’aperçut bien que j’étais fière et que j’avais du caractère, et que je ne voulais dépendre que de moi.

 

NOTES ÉPARSES

 

                Saint-Just demeurait rue Gaillon, près Saint-Roch, dans un hôtel garni ; c’est de là que nous partîmes pour l’armée.

 

*              *              *

 

                Parler du général Burnouf. Il se conduisit bien mal avec moi après la mort de mon Philippe. Cet homme lui a dû la vie. Lui et le général Jourdan se trouvaient compromis dans une affaire où il ne s’agissait rien moins que de la mort. Le Bas, Saint-Just, Robespierre, et d’autres députés patriotes virent bien que c’était une trahison, qu’ils étaient innocents ; mais avant tout, il fallait les soustraire à leurs dénonciateurs.

                Le Bas cacha Burnouf pendant quarante-huit heures, et Saint-Just cacha chez un de ses amis le général Jourdan.

                Ces bons amis passèrent deux jours au Comité général pour les défendre et démontrer leur innocence. Il fut prouvé qu’on cherchait déjà à attaquer les vrais amis de la patrie, et l’on reconnut plus tard que c’étaient les mêmes traîtres qui conspiraient sourdement contre les amis de la République : c’étaient les Tallien, les Fouché, les Rovert, les Bourdon de l’Oise, les Collot d’Herbois, les Varennes [Billaud-Varenne]…...

 

*              *              *

 

                Mon mari avait un chien nommé Schillichem, de race allemande ; il ne revint que trois jours après la mort de son maître ; il était haletant, la langue pendante ; cette pauvre bête avait passé ce temps sur la tombe de son maître.

 

*              *              *

 

Note sur un ouvrage traitant de la Révolution

(mort du conventionnel Le Bas[2]).

 

                Il y a de grandes fautes dans cet ouvrage. Pourquoi se servir du mot de « cadavre » ? Son corps fut porté par deux gendarmes, je crois, à Saint-Paul ; mon fils a son extrait mortuaire. Il ne fut pas jeté dans le tombereau avec ses amis.

                Il a su mourir pour la patrie ; il ne devait mourir qu’avec les martyrs de la liberté ! Il me laissa mère et veuve à vingt et un ans et demi. Je bénis le ciel de me l’avoir ôté ce jour-là ; il ne m’en est que plus cher.

                Ils m’ont traînée de prison en prison avec mon jeune fils de six semaines ; il n’est pas de souffrance qu’ils ne m’aient fait endurer. Les monstres croyaient m’intimider ; je leur fis voir qu’ils n’y arriveraient pas ; plus ils m’en faisaient, plus je leur fis voir que j’étais heureuse de souffrir ; j’aime la liberté ; le sang qui coule dans mes veines, à soixante-dix ans, est un sang de républicaine. Je n’ai jamais quitté le nom, si cher à mon cœur, que je me fais gloire de porter.

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                Oui, je fus bien malheureuse à la sortie de la prison où je suis restée huit mois….. Je me trouvai seule, sans ressources, avec mon jeune enfant ; toute ma famille dans les fers….. Vous vous trompez pour mon père : il ne fut pas condamné à mort, comme vous le dites ; il fut acquitté par le tribunal révolutionnaire. Ma pauvre mère fut étranglée par des monstres atroces. Mon père et ma mère étaient incarcérés au Plessis, rue Saint-Jacques.

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                Oui, j’ai préféré aller savonner au bateau, plutôt que de demander des secours aux assassins de nos pauvres amis. Je ne craignais pas la mort ni la persécution. Ce n’est pas moi qui ai quitté mon nom ; je dois le dire avec peine, c’est Mlle Robespierre qui prit le nom de sa mère, Charlotte Carreau [Carrault]. Je vous prie de rectifier toutes ces erreurs ; il faut dire la vérité lorsque l’on écrit l’histoire.

                Si vous vous étiez informé de ma demeure, je me serais empressée de vous dire la vérité. Le bien que vous dites de nos martyrs n’est pas trop chargé : c’étaient les vrais amis de la liberté ; ils ne vivaient que pour le peuple, pour leur patrie ; mais les monstres, en un seul jour, ont tout détruit ; en un seul jour on a assassiné la liberté. Oui, monsieur, un républicain comme vous eût été heureux de connaître ces hommes si vertueux sous tous les rapports ; ils sont tous morts pauvres.

 

*              *              *

 

                Robespierre eut une impression affreuse du vote du duc d’Orléans : « Quoi, dit-il, lorsqu’il pouvait se récuser si aisément ! » Cet homme, profondément immoral et si désireux de devenir roi, avait répandu la plus grande partie de sa fortune pour parvenir à son but : les Mirabeau, les Danton, les Camille Desmoulins, les Collot d’Herbois, les Billaud-Varennes [sic], et tant d’autres aussi méprisables que lui, avaient eu part à ses prodigalités corruptrices.

 

(En marge et au crayon, on lit :)

                Quand Camille Desmoulins se maria, le duc d’Orléans lui fit meubler un appartement rue de l’Odéon.

 

*              *              *

 

Détails sur notre habitation et sur notre intérieur :

 

                Une grande porte cochère. Deux boutiques, une de chaque côté, occupée, l’une par un bijoutier, l’autre par un restaurateur. Sur le devant, un seul étage, occupé par la sœur de Robespierre et par son frère cadet. L’entrée de cet appartement s’ouvrait à gauche, sur un grand escalier ; dans la cour, deux hangars, un pour les ouvriers, un autre pour le bois ; à droite de la cour, un petit jardin de vingt pieds carrés ; au milieu, comme une corbeille de fleurs, chacun des enfants avait son petit coin.

                En entrant, une salle à manger, au fond une cuisine, ayant un jour de souffrance sur le jardin des religieuses de la Conception, dont mon père était locataire. C’est dans ce couvent que nous avons fait, mes sœurs et moi, notre première communion.

                A droite de la salle à manger, un salon éclairé par une croisée donnant sur le petit jardin ; à gauche du salon, un cabinet d’étude, avec un jour de souffrance donnant sur la cabane du jardinier du couvent de la Conception. Dans la salle à manger, un petit escalier en bois par où l’on montait dans les appartements ; à droite était la chambre à coucher de ma mère, éclairée par deux croisées ; à droite de la chambre, et y attenant, un petit cabinet de toilette, qu’on traversait pour entrer dans la modeste chambre de Maximilien.

                Elle n’avait qu’une croisée, une cheminée ; son mobilier était le plus simple du monde : un lit de noyer ; les rideaux du lit en damas bleu à fleurs blanches, garniture provenant d’une robe de ma mère ; un très modeste bureau ; quelques chaises de paille ; il y avait aussi un casier servant de bibliothèque. Cette chambre était éclairée par une fenêtre donnant sur les hangars, en sorte que Robespierre entendait sans cesse le bruit du travail, mais sans en être troublé.

                A la suite de la chambre de Robespierre, mais d’un degré plus bas, se trouvaient deux cabinets, éclairés du même côté que cette chambre, occupé l’un par Simon Duplay, mon cousin, qui perdit une jambe sur le champ de bataille de Valmy, l’autre par mon frère Maurice, jeune écolier de quatorze ans. Le second cabinet donnait sur le grand escalier de Mlle Robespierre, et rejoignait ainsi le reste de la maison.

 

*              *              *

 

                Robespierre envoyait Le Bas avec Saint-Just en mission parce qu’il savait Le Bas calme et juste, quoique ardent, et capable de modérer Saint-Just, dont le caractère véhément et passionné aurait été quelquefois nuisible aux intérêts de la Patrie.

 

*              *              *

 

                Robespierre croyait à l’Être suprême et à l’immortalité de l’âme. Que de fois il m’a grondée, de ce que je ne semblais pas y croire avec la même ferveur que lui ! Il me disait : « Tu as grand tort ! Tu seras malheureuse de ne pas y croire ; tu es bien jeune encore, Élisabeth ! Pense bien que c’est la seule consolation sur la terre ! »

 

*              *              *

 

Famille Duplay.

 

                Nous étions cinq enfants : quatre filles, Éléonore, Sophie, Victoire, Élisabeth ; un frère nommé Maurice : c’était le plus jeune de la famille. Ma sœur aînée était promise à Robespierre ; ma sœur Sophie avait épousé, sous la Constituante, M. Auzat, avocat à Issoire, en Auvergne ; ma sœur Victoire ne fut jamais mariée. J’épousai Philippe Le Bas.



[1] Le Bas se donnait la mort quelques heures après. (V. p. 292).

[2] Cette note a été écrite, par Mme Le Bas, quelques années avant sa mort; elle semble être un projet de réponse aux allégations continues à la fin du tome IV de l’Histoire des Girondins.

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